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Interview : Moises Bbarón Ccárdenas Union Syndicale Ouvrière de l’industrie pétrolière (Colombie)
18 mars 2025
Interview : Moises Bbarón Ccárdenas Union Syndicale Ouvrière de l’industrie pétrolière (Colombie)
Photo : Moises Barón (3eme en partant de la gauche) avec des camarades de la USO_©Ioanna Gimnopoulou/Solsoc
Moises Barón est technicien dans la plus grande raffinerie de pétrole de Colombie, à Barrancabermeja. Il est aussi avocat et membre du syndicat des travailleurs de l’industrie pétrolière (USO), partenaire de la Centrale Générale FGTB et d’IFSI.
Quels sont les principaux problèmes environnementaux causés par l'industrie pétrolière à Barrancabermeja ?
Le cadre réglementaire de l'État est trop laxiste, ce qui permet à l'entreprise d'opérer avec peu de contrôle. Cela a entraîné une pollution significative des cours d'eau, comme en attestent plusieurs études. L'air est également contaminé par des particules fines. Un rapport du Programme de Développement et de Paix du Magdalena Medio a aussi révélé une dégradation des sols, due aux pluies acides générées par les émissions de soufre issues de la raffinerie.
Quelles actions ont été menées par les travailleur∙euse∙s face à cette pollution ?
Le syndicat a constamment revendiqué de meilleures conditions environnementales et sanitaires. Nous avons demandé des mesures pour limiter la dispersion de particules néfastes usés et la pollution de l'air.
Une étude sur la santé des travailleur∙euse∙s de la raffinerie, impliquant l'Organisation Panaméricaine de la Santé et des experts cubains, a confirmé une exposition aux substances cancérigènes et un taux élevé de cancers et de malformations congénitales. Nous avons réclamé l'intégration de tests de détection précoce dans les bilans de santé des travailleurs, mais Ecopetrol a refusé, prétextant la protection de sa sécurité juridique et économique.
Nous nous sommes aussi mobilisés contre un projet de fracking [ou fracturation hydraulique, technique utilisée pour extraire du pétrole et du gaz emprisonnés dans des roches profondes sous terre, qui peut polluer l’eau, causer des tremblements de terre et aggraver le changement climatique]. Nous nous sommes associés à des leaders environnementaux et communautaires. Nous avons organisé des formations et des actions de sensibilisation sur les dangers du fracking, en expliquant son impact sur l'eau, les terres agricoles et la santé. Parallèlement, nous avons mené des manifestations, des blocages et avons intenté des actions juridiques. Cela a mené à la suspension du projet.
Pourquoi est-il essentiel d'impliquer les travailleurs dans la transition énergétique ?
La transition ne peut pas être réduite à un simple changement de sources d'énergie. Elle doit inclure les travailleuses et les travailleurs, car ce sont eux qui subiront les conséquences sociales et économiques de ces mutations. Nous devons planifier la reconversion des emplois et assurer des alternatives économiques aux territoires impactés par la fin de l'extraction fossile.
Actuellement, nous observons une captation des énergies renouvelables par le capitalisme, qui cherche à en conserver le monopole. Les minerais critiques pour la transition, comme le lithium et le cobalt, font peser une nouvelle menace extractiviste sur nos territoires. Nous devons donc nous battre pour une transition énergétique démocratique et juste, qui respecte les travailleurs et les communautés locales.